Edition du Jura, Nordic Magazine, Biathlon Magazine, Numéro 39, Skinordique, Ski-nordique

Auteur de L’histoire du biathlon aux Jeux, le journaliste Stéphane Magnoux revient sur la genèse de ce projet et sa réalisation au fil des mois. Un siècle de biathlon aux Jeux et de son ancêtre, la patrouille militaire, y est résumé en 192 pages et près de 300 photos. Entretien.

  • Comment est né ce livre sur l’histoire du biathlon aux Jeux olympiques ?

Début juillet 2024, Franck Lacroix, le fondateur des Editions du Jura, qui éditent le livre, m’a contacté. Il m’a parlé de son envie de réaliser un livre sur le biathlon aux Jeux, avec la perspective de Milan/Cortina 2026, et de son caractère inédit. Il n’y avait jamais eu, en France, un ouvrage regroupant toute l’histoire du biathlon aux Jeux olympiques. Avec Franck, on se connait depuis une dizaine d’années. On s’était rencontré lors des championnats du monde de ski nordique de Falun en Suède, en 2015, que j’avais couvert pour le groupe Ebra. Depuis, on était resté régulièrement en contact. J’ai commencé à collaborer avec Nordic Magazine et Biathlon Magazine il y a quelques années quand je suis devenu journaliste indépendant.

  • Avez-vous longtemps hésité avant de vous lancer dans cette aventure ?

Non ! Franck m’a laissé le temps de la réflexion mais, dans ma tête, je ne me voyais pas refuser un tel projet. J’étais parmi les co-auteurs du Dico du biathlon il y a quelques années et j’avais adoré cette expérience. Ecrire un livre autour du ski nordique trottait dans ma tête depuis un moment. Ce projet est arrivé au bon moment. Malgré tout, j’étais loin d’imaginer le volume de travail qu’allait représenter L’histoire du biathlon aux Jeux ! C’est un projet sur lequel j’ai travaillé durant près d’un an, en plus de mon activité régulière de journaliste.

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  • De quelle manière avez-vous conçu cet ouvrage ?

Par ordre chronologique ! L’idée était de faire le récit du biathlon aux Jeux. Ce livre a été conçu comme un film. On part de Chamonix en 1924 et des premiers Jeux d’hiver où on ne parle pas encore de biathlon mais de son ancêtre, la patrouille militaire. On avance au fil des éditions et on voit apparaître tous les personnages emblématiques du biathlon aux JO. Parfois dans des rôles secondaires puis en pleine lumière sur l’édition d’après ou encore au crépuscule de leur carrière. On passe par toutes les émotions entre les succès des uns et les déceptions des autres. Pour chaque édition, j’ai commencé par regarder le contexte géopolitique de l’époque, les conditions dans lesquelles se sont déroulés les épreuves de biathlon et les palmarès. A partir de cette base, je sélectionnais les angles qu’ils me semblaient intéressants de traiter et je me lançais dans mes recherches. J’ai consulté des journaux d’époque, des ouvrages spécialisés, des sites Internet et recoupé toutes ces informations pour en conserver l’essentiel. Selon les époques, le nombre de pages est plus ou moins important. La patrouille militaire est donc apparue aux Jeux de Chamonix en 1924 puis sporadiquement jusqu’en 1948. En 1960, pour ses grands débuts olympiques, le biathlon ne comptait qu’une épreuve avec l’individuel masculin. Désormais, il y en a onze. On a tendance à l’oublier, mais les femmes n’ont eu le droit de pratiquer le biathlon aux JO qu’en 1992 à Albertville ! C’est aussi révélateur de l’époque…

  • Avez-vous découvert des choses que vous ignoriez sur l’histoire du biathlon aux Jeux ?

Enormément ! Mes premiers souvenirs remontent aux Jeux d’Albertville en 1992 – j’avais douze ans – quand Anne Briand, Véronique Claudel et Corinne Niogret ont remporté le relais. C’était la première médaille d’or du biathlon français et la première fois qu’on parlait autant de la discipline dans les médias. En écrivant le livre, chaque fois que je faisais référence à cette période, je ressentais une émotion particulière. Je revoyais défiler toutes les images et les scènes de joie qui ont suivi. Cette période me touche d’autant plus que j’ai eu la chance, quand je travaillais dans les Vosges, de côtoyer régulièrement Francis Mougel, le coach de ce relais en or. Après avoir été l’entraîneur des filles de l’équipe de France pendant une dizaine d’années, il est devenu le conseiller technique du biathlon vosgien. Même si je connaissais les principaux champions d’avant 1992, je n’imaginais pas que l’histoire du biathlon aux Jeux était autant liée à l’histoire en général.

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  • C’est-à-dire ?

A la lecture du palmarès olympique, on croise une partie des bouleversements qu’a connue le monde après la Seconde Guerre mondiale. On retrouve la puissance du bloc soviétique puis son effritement progressif jusqu’à la disparition de l’URSS en 1991. Puis vient le temps de l’Allemagne de l’Est. A chaque fois, l’ombre du dopage plane et le passé trouble de certains athlètes soviétiques refait surface. Je n’aurais jamais songé parler du KGB, les services secrets soviétiques, dans le livre ou d’un coup de sang du président biélorusse, Alexandre Loukachenko, aux Jeux de Nagano en 1998 ! Dominé par une poignée de nations lors de ses premières apparitions aux Jeux, le biathlon s’est progressivement internationalisé à partir des années 80 et on a vu apparaître plus régulièrement la Norvège, la France ou encore la Suède sur les podiums ainsi que tout un tas de nations comme la Bulgarie, la Slovénie et le Canada.

  • Parmi tous les champions évoqués dans le livre, si vous ne deviez en retenir qu’un…

Ole Einar Bjoerndalen. Sans hésiter ! On peut toujours s’amuser à comparer les palmarès d’Ole Einar Bjoerndalen, Johannes Thingnes Boe et Martin Fourcade pour déterminer qui est le plus grand biathlète de tous les temps mais ce qu’a fait Bjoerndalen aux Jeux reste unique ! Il est le seul avec huit médailles d’or olympiques et a remporté le sprint des Jeux de Sotchi en 2014 à plus de quarante ans ! A ce moment-là, il n’avait pas gagné de course au niveau international en individuel depuis près de deux ans et je ne connais pas grand monde qui aurait misé une couronne norvégienne sur sa victoire ! Sa longévité est exceptionnelle. Entre 1994 et 2014, il a participé six fois aux Jeux. Hormis à Lillehammer en Norvège en 1994, il a toujours remporté au moins une médaille par édition et, en 2002 à Salt Lake City, il a gagné les quatre courses à son programme : l’individuel, le sprint, la poursuite et le relais masculin.

 

« L’ambition, c’est que ce livre plaise autant aux passionnés de biathlon de la première heure […] qu’à ceux qui rêvent de voir Lou Jeanmonnot et Eric Perrot en or aux Jeux de Milan/Cortina 2026 »

Stéphane Magnoux

 

  • A l’inverse, on découvre dans le livre que de nombreux champions ont eu une relation contrariée avec les Jeux…

Certains ont gagné la coupe du monde et les championnats du monde, parfois à de nombreuses reprises, mais l’or olympique manque à leur palmarès. C’est notamment le cas de Raphaël Poirée. Il a remporté l’argent de la poursuite en 2002 et deux médailles de bronze en relais en 2002 et 200, mais il y a toujours eu un grain de sable pour l’empêcher d’être champion olympique. Quand Martin Fourcade remporte la poursuite de Sotchi en 2014, il décroche le dernier titre majeur qui manque à son palmarès. L’une de ses premières pensées est pour Raphaël Poirée. Il a été marqué par sa malchance aux Jeux et l’absence, injuste selon moi, d’or olympique à son palmarès. Martin Fourcade ne voulait pas connaître le même sort. Plus près de nous, l’Italienne Dorothea Wierer, qui tirera sa révérence après les Jeux de 2026, dans son pays, court encore après l’or olympique.

  • Pour résumer, à qui s’adresse ce livre ?

A tout le monde [rires] ! J’espère que les amateurs de biathlon y trouveront leur compte en se remémorant les exploits du passé ou plus récents et qu’ils découvriront de nombreuses anecdotes qu’ils ignoraient. Pour les férus d’histoire, de nombreux acteurs majeurs des XXe et XXIe siècles apparaissent au fil des pages comme Hitler qui avait milité pour que la patrouille militaire soit intégrée comme sport de démonstration aux Jeux de Garmisch-Partenkirchen en 1936 ou Charles de Gaulle, ardent défenseur des Jeux de Grenoble en 1968 pour accroître le prestige de la France. L’ambition, c’est que ce livre plaise autant aux passionnés de biathlon de la première heure, ceux qui savent que le premier champion olympique de biathlon en 1960 était Suédois et qu’Yvon Mougel était le porte-drapeau de la France aux Jeux de Sarajevo en 1984, qu’à ceux qui rêvent de voir Lou Jeanmonnot et Eric Perrot en or aux Jeux de Milan/Cortina 2026.

A propos de l'auteur : My Nordic

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